Le transit d’Uranus en Taureau

Cet article est la mise en forme d'une conférence donnée dans le cadre de l'Association Source en février 2024.

Dans cette réflexion, je propose quelques repères pour penser le transit d’Uranus en Taureau. Je vais le faire à partir du thème de deux clientes que j’ai accompagnées il y a quatre ou cinq ans, alors que la planète Uranus était entrée dans le deuxième signe du Zodiaque.

Pour la première, l’enjeu de ce transit se présentait à peu près de cette manière : à la faveur du transit d’Uranus, elle avait besoin de voir le Taureau autrement et de reconnaître des qualités et des valeurs qu’elle négligeait. Pour la seconde, l’enjeu se présentait sous un tout autre angle. Certaines tendances propres au deuxième signe conditionnaient largement sa vie affective, en particulier. Dans son cas, il s’agissait de questionner ces tendances et de les mettre en lumière à la faveur du transit d’Uranus.

Je vais y venir, mais je souhaite d’abord préciser la démarche que j’adopte pour tenter de penser une planète dans le cadre du thème de naissance comme dans celui d’un transit. Cette démarche s’inspire de Jung et de sa manière de concevoir la mythologie que je décris dans la page de présentation de ce site. Je reprends ici quelques éléments de cette réflexion.

La mythologie a d’abord réuni Freud et Jung autour d’une passion commune, avant de les éloigner peu à peu pour constituer finalement un facteur significatif de leur rupture. En bref, comment cela s’est-il passé ? Freud pensait que les mythes antiques étaient de nature à étayer la théorie psychanalytique. Il encouragea Jung à poursuivre ses recherches dans ce domaine en espérant que son dauphin parvienne aux mêmes conclusions que lui, mais les chemins ont bifurqué, là où ils s’étaient rencontrés. Alors que Freud cherchait dans la mythologie une illustration et une confirmation de la théorie, Jung fut amené finalement à renverser l’équation en reconnaissant au mythe la capacité d’éclairer la clinique et de repenser la théorie.

À la manière de Freud dans son domaine, il arrive souvent que l’astrologue s’appuie sur un épisode de la mythologie pour illustrer le discours tenu sur une planète. Ce faisant, on réduit le mythe à un simple savoir confirmant : on lui fait dire ce que l’on veut en entendre et l’on se préserve de son aspect subversif, là où il serait susceptible de remettre en cause certaines idées établies. Dans l’esprit de Jung, la mythologie apparaît tout autrement. Elle n’a jamais fini de nous enseigner. De mon point de vue, cela vaut d’abord pour l’astrologue.

Dans son livre intitulé Comment acquérir des connaissances sur les mondes supérieurs, Rudolf Steiner utilise une formulation qui s'applique particulièrement bien aux connaissances astrologiques. « Ne pas essayer, par des spéculations intellectuelles, de déterminer la signification des choses, mais plutôt permettre aux choses elles-mêmes de la donner. »

Si l'on applique cette idée de Steiner à la réflexion astrologique, on est amené à formuler les choses de cette manière : « Ne pas chercher, à travers des spéculations intellectuelles, la signification d'une planète, mais permettre à la planète elle-même de nous montrer ce qu'elle signifie. » La manière privilégiée avec laquelle une planète se donne à voir, c'est à travers les épisodes mythologiques qui mettent en scène la divinité en question ou bien le royaume qui est le sien.

S’agissant d’Uranus, nous avons d’abord à nous référer à la figure d’Ouranos, à la place qu’il tient et au rôle qu’il joue dans le mythe. Dans la Théogonie d’Hésiode, on voit Ouranos laisse tomber sa semence dans les fentes secrètes de Gaïa. À travers la puissance séminale du Ciel Étoilé, la Terre-Mère devient féconde. Elle était une matrice qui regorgeait de promesses, mais de promesses qui sommeillaient. Voici qu’elle entre en gestation de la création et qu’elle devient capable d’enfantement.

Dans le cadre d’une petite conférence, je n’ai pas le temps d’analyser ce mythe des commencements dans le détail, mais ce que je viens d’en dire nous permet de passer de la mythologie à l’astrologie et de nous donner quelques premiers repères d’interprétation pour la planète Uranus.

– Dans la droite ligne d’Ouranos, Uranus a pour fonction de réveiller ce qui était en état de sommeil ;

– De révéler ce qui était encore virtuel ;

– Il nous permet de voir ce qui n’était pas vu ou qui n’était pas pris en compte ;

– De penser ce qui ne pouvait pas être pensé et d’imaginer ce qui restait dans l’ordre de l’inconcevable.

Dans le mythe, Ouranos permet le surgissement d’une création qui attendait d’être mise à jour. À la faveur d’un transit d’Uranus, on pourra d’abord dire que la planète suscite l’émergence de potentialités restées enfouies, partant, le renouvellement de soi et la réinvention de certains aspects de notre existence.

S’agissant du transit d’Uranus dans le deuxième signe, on gagnera à considérer maintenant le signe du Taureau comme une matrice de possibles qui reçoit la semence lumineuse du Ciel Étoilé. C’est le moment, si vous voulez, de voir, de penser autrement la sphère du Taureau pour que le signe puisse révéler ses qualités encore secrètes et pour que nous puissions les intégrer à notre existence. Le deuxième signe du Zodiaque s’articule à l’exaltation de la Lune et à la maîtrise de Vénus.

– La dimension lunaire du Taureau se rattache à la mythologie de Déméter, la déesse qui nourrit l’humanité. Elle recouvre les enjeux liés à l’incarnation et à l’enracinement corporel, à la sécurité de base, à l’attachement, aux capacités de détente et de repos.

– La dimension vénusienne du Taureau s’exprime comme capacité à investir la vie de sensations, à trouver une harmonie corporelle, à éprouver le goût de la vie et la saveur de l’existence, à prendre du plaisir, à s’entourer de bonnes choses, à exprimer de la beauté à partir du corps, à travers le chant et la danse, par exemple, et de la beauté à partir de la matière.

À ce titre, le transit d’Uranus peut révéler que certaines qualités du Taureau que je viens d’énumérer sont trop peu prises en compte et qu’elles mériteraient d’être considérées à leur juste valeur. Dans d’autres cas, certaines valeurs du Taureau sont méconnues, dépréciées, voire rejetées par le sujet. Dans la perspective de Jung, on dira que ces qualités sont constitutives de l’Ombre. Brièvement, on peut dire que le complexe de l’ombre se constitue à partir de composantes psychiques ou de composantes de l’horoscope qui mériteraient d’être prises en compte et intégrées, mais qui sont négligées et condamnées à mener une existence obscure. Les raisons de ce bannissement peuvent être complexes, mais l’ombre apparaît d’abord comme contrepartie de la lumière. Par lumière, j’entends ce à quoi le sujet s’identifie, peut-être ce qu’il idéalise avec ses représentations et ses valeurs. Par opposition, l’ombre renvoie à ce qui nous paraît étranger, c’est le contraire de l’identification, et éventuellement ce que l’on diabolise, c’est le contraire de l’idéalisation.

 

Thème | 1

Que fais-tu de moi, c’est la question posée par l’ombre, parce qu’elle parle au nom de ce qui est négligé. Vois-tu la valeur du Taureau ? Reconnais-tu ses dispositions et ses qualités ? Ce sont les questions, pourrait-on dire, que la planète Uranus pose à la première cliente dont j’ai parlé en préambule. Le thème de naissance est marqué par l’importance de l’élément Air avec notamment un Ascendant-Gémeaux et Vénus culminante en Verseau. Au fil des séances, j’ai pu vérifier de différentes manières que cette sphère aérienne correspondait chez elle à quelque chose de très vivant, de très riche et notamment au niveau du tissu amical et social.

Souvent, elle déplorait manquer de temps pour voir ses amies, répondre aux sollicitations sociales et développer ses multiples intérêts. Un jour, elle m’a fait part de deux rêves survenus la semaine précédente, au cours de la même nuit. Dans le premier, elle conduisait très vite sur une route enneigée et elle a fini par faire une embardée. Dans le second, elle conduisait aussi à très vive allure, mais elle a été dépassée par une motocycliste. En la voyant filer, elle s’est dite : « Elle est un peu folle de rouler à cette vitesse ! »

Dans sa vie diurne, elle a mille et une choses à faire et comme elle est en retard pour partir à son travail, elle conduit effectivement trop vite. Si elle pouvait accélérer encore ou si les journées duraient au moins 30 heures, tout irait mieux : c’est à peu près sa logique. Le rêve reprend ce motif de la course contre la montre, mais elle a commis un lapsus en parlant de course contre la mort. La scène onirique renverse le point de vue : tandis que cette femme cherche le salut dans la vitesse, le rêve montre que le remède est dangereux. La bonne nouvelle, dans la seconde scène, c’est que la rêveuse prend en compte le risque que court la motocycliste interne qui voudrait aller encore plus vite qu’elle.

Dans le monde aérien, il y a beaucoup d’agilité et de vélocité. L’esprit est souvent alerte ; les gestes sont rapides et le sujet peut être capable, par exemple, d’accomplir plusieurs tâches en même temps. Le commerce avec les natures aériennes peut être très agréable et je n’ai certainement jamais autant plaisanté, dans le cadre de séances, qu’avec cette cliente. Comme tout excès, celui de l’Air comporte ses propres risques, d’autant plus que cette femme fonctionne tellement bien en coups de vent, qu’elle se demande comment faire tourner l’éolienne un peu plus vite.

En réalité, la tendance à vouloir toujours améliorer ce qui fonctionne bien vaut pour n’importe quelle accentuation thématique. Le Saturnien se voudrait encore plus responsable, détaché, voire stoïque. Le Vénusien aimerait parfaire encore l’harmonisation du monde. Le Scorpion voudrait encore plus d’intensité de vie ou d’implication affective. C’est un peu de la caricature, mais qui a néanmoins le mérite de souligner l’unilatéralité des valeurs et l’enfermement dans un système que l’on s’emploie à perfectionner. D’un côté, on ne le questionne pas et, de l’autre côté, on ne peut pas envisager d’autre voie que la route que l’on cherche à maîtriser de mieux en mieux. Ce sont deux manières, indissociables, de résister à l’œuvre uranienne de réinvention et de renouvellement.

À la séance suivante, cette femme revient sur la question de la vitesse, qu’elle a bien prise en compte, et elle me fait part d’un autre rêve. Elle a recueilli des petites tortues qu’elle dépose dans un bain. Elle se rend compte qu’elles n’y sont pas à l’aise du tout, parce que la température de l’eau est trop élevée. Elle voudrait bien refroidir le bain, mais elle ne sait pas comment s’y prendre. Arrive son compagnon. Il suffit qu’il mette ses mains dans la bassine pour que la température de l’eau se régule de manière satisfaisante.

Pendant que le sujet cultive les vertus de la vitesse, le rêve se fait l’avocat de l’ombre ou, comme on dit, l’avocat du diable : loin de poursuivre des lièvres, le moi onirique prend soin de petites tortues. C’est une excellente nouvelle, d’autant plus que la rêveuse prend son rôle de mère très au sérieux : elle veut offrir un environnement adéquat aux petites tortues, mais elle ne sait pas comment abaisser la température. J’ai relancé la réflexion de cette manière. « Dans le rêve, c’est votre compagnon qui est capable de faire baisser la température. Pourquoi apparaît-il ainsi, à votre avis ? »

« Mon compagnon est capable de faire une seule chose à la fois, au jardin, par exemple. Après, il s’arrête, il prend un bouquin et s’installe sur une chaise longue. J’avoue que ça me fait suer, parfois. »

Du point de vue du transit d’Uranus en Taureau, le débat psychique est bien posé. À travers les tortues qui font l’éloge de la lenteur et le compagnon qui sait en prendre soin, parce qu’il partage leur art de vivre, une nouvelle voie se dessine. Dans le rêve, ma cliente voudrait cultiver la lenteur, mais elle n’a dans ses mains que la fièvre de la précipitation qui fait aussi le jeu, dans son thème, du besoin d’efficacité et de contrôle représenté par Pluton-Vierge qui est opposé à la Lune en Poissons.

À partir de cette brève analyse onirique, on entend que le désir uranien de renouvellement se heurte à des conditionnements, des enfermements dans la répétition et, en un mot, des résistances aux changements.

– Du point de vue d’Ouranos, nous l’avons dit, Uranus vient libérer ce qui était enfoui, la libération étant à entendre ici comme une délivrance, une mise au monde. Dans le cas de ma cliente, il vient parler au nom d’un certain art de vivre où le Taureau fait l’éloge de la lenteur. Dans un autre cas, Uranus viendra mettre en lumière d’autres qualités du Taureau, celles que le sujet aurait besoin de prendre en compte.

– Par rapport aux résistances, la planète Uranus mérite d’être regardée du point de vue de l’archétype du Libérateur. À ce titre, je rapporte Uranus à la figure de Prométhée, le porteur de Feu et le briseur de chaînes par excellence.

– Là aussi, je ne fais que le mentionner, mais une analyse détaillée du mythe de Prométhée nous permettrait de préciser tout ce que le Titan partage avec la planète Uranus.

– À la faveur d’un transit d’Uranus, je dirai donc maintenant que nous avons aussi besoin d’honorer Prométhée et son esprit de révolte que nous voyons s’exprimer, par exemple, là où un peuple se dresse contre une tyrannie ou bien là où un discours dénonce certaines formes d’oppression. Dans le même ordre d’idées, certaines personnes ont besoin de reprendre à leur compte l’œuvre du Titan pour s’affranchir de situations familiales, relationnelles ou professionnelles opprimantes.

– Comme je l’ai évoqué en préambule, je vais proposer maintenant un autre exemple astrologique pour illustrer la situation où les résistances au changement viennent du signe du Taureau lui-même. À l’occasion du transit d’Uranus, cela signifie que certaines personnes auraient besoin d’emboîter le pas de Prométhée afin de remettre en cause certaines tendances propres au deuxième signe.

 

Thème | 2 

Ce thème de naissance présente une conjonction exacte en Taureau entre la Lune et l’Ascendant qui recevait à l’époque le transit d’Uranus. Quelques mots pour commencer sur l’exaltation de la Lune en Taureau. Le latin “exaltatio” désigne l’action de célébrer, de glorifier. Pourquoi le Taureau est-il le mieux placé dans le Zodiaque pour faire la gloire de la Lune ?  Parce qu’il renvoie d’abord à Déméter, la déesse de la végétation sans laquelle la vie terrestre serait impossible. À l’instar de la mère qui représente pour l’enfant la condition même de la vie, le signe du Taureau réfère d’abord à l’instinct primordial de conservation de la vie.

Dès le début de l’existence, l’enfant dispose de facultés d’agrippement, dont on peut dire qu’elles sont le versant corporel du processus d’attachement, et de facultés de succion et de déglutition, qui sont le versant physiologique de la capacité psychique à absorber ce qui vient de l’objet maternant. Tout au long de la vie, l’idée de conserver, de s’agripper ou de s’approprier se décline selon plusieurs modalités qui peuvent donner à voir la manière avec laquelle la puissance archétypale du Taureau exerce son emprise. Par exemple, à travers le fait de poursuivre la sécurité, de se focaliser sur les ressources nécessaires à la vie, de s’attacher les choses, les lieux et les personnes. Le cas échéant, le transit d’Uranus aurait pour vocation d’éclairer les modalités archaïques propres au signe du Taureau, cette mise en lumière étant le préalable à un éventuel affranchissement.

Dans le thème de naissance de cette femme, la conjonction entre la Lune et l’Ascendant dessine un carré avec Vénus et la Lune Noire. Quand la Lune Noire est impliquée, les enjeux sont toujours surlignés et nous allons nous concentrer sur cette configuration activée par le transit d’Uranus. J’ai connu cette femme dans le cadre d’un atelier des rêves et j’aborde également la question à travers une scène onirique qu’elle nous a confiée.

Je me trouve dans une salle avec d’autres femmes qui circulent autour de tables sur lesquelles il y a plein de choses sucrées à grignoter. Une soignante, médecin ou infirmière, veut nous sauver ou nous protéger de quelque chose en proposant un vaccin avec deux rappels et visiblement je devais commencer, d'autres femmes suivraient. Elle enfile une très grosse aiguille juste sous la peau de ma cuisse sur 10 à 15 cm ; c’est une aiguille à coudre avec un fil épais que je vois en transparence sous ma peau. D'un côté il y a 2 ou 3 perles et elle arrête de l'autre côté de la même façon.  Quand je me retrouve au milieu des autres femmes, une angoisse me prend. Il faut que j'alerte tout le monde de ne pas faire comme moi, car l'on ne sait pas les conséquences de ce vaccin. Je m'agite, parle aux autres, complètement affolée. Je me réveille en sanglotant.

 Avec les tables recouvertes de douceurs à grignoter, le décor est posé. Il fait écho au conte Hansel et Gretel, où le frère et la sœur, abandonnés dans la forêt, découvrent une maison constituée en pain d’épices, en gâteaux et en sucres. Ils vont tomber dans les griffes de la sorcière, comme ombre de la marâtre qui les a abandonnés à leur sort. La maison de sucre et de miel attire forcément l’enfant qui a manqué d’attachement sécurisé et qui manque d’instinct protecteur pour distinguer la mère de la sorcière.

Ce décor anticipe le motif du vaccin : à chercher le salut du côté d’une protection de type maternel, on se maintient dans un certain état de dépendance et l’on risque de tomber sous une forme d’aliénation au pouvoir de l’autre symbolisée dans le conte par la figure de la sorcière. La soignante apparaît bienveillante. Elle propose un vaccin qui fait miroiter de la sécurité, voire une assurance sur la vie, mais l’administration du vaccin engendre finalement de l’angoisse.

Avec son aiguille à coudre et les perles qu’elle apprête, je lui fais remarquer que la soignante se présente comme une couturière, plutôt qu’une infirmière. Et je lui demande ce que cela évoque pour elle. C’est alors qu’elle nous raconte que sa mère était couturière et qu’elle nous donne quelques éléments biographiques.

– Les parents se sont séparés, quand elle était âgée de trois ans.

– À partir de là, elle a vécu avec la grand-mère maternelle.

– De son côté, a mère était accaparée par son travail de couturière qui lui permettait tout juste de subvenir à leurs besoins.

– Quand elle a douze ans, la grand-mère décède ; à partir de ce moment, elle vit avec sa mère qui travaille à domicile.

– Elle est mariée depuis longtemps à un homme dont elle dit qu’il est pour elle un peu comme un père et une mère.

– Elle a eu plusieurs amants ; une vie sexuelle qu’elle qualifie de débridée.

– Elle s’est stabilisée, dit-elle, depuis plusieurs années et elle a trouvé un certain équilibre entre son mari-parent et un ami-amant.

Ces quelques éléments biographiques ont en commun de montrer d’abord une problématique lunaire qui tient aux troubles de l’attachement. Par rapport au thème de naissance ces troubles font d’abord écho au carré entre la Lune et la Lune Noire. La séparation des parents occasionne une double perte, celle du père qu’elle reverra à de rares occasion, et celle de la mère qui vient lui rendre visite, dans la mesure où ses activités lui en laissent le temps. À douze ans, elle subit une nouvelle perte avec le décès de la grand-mère à laquelle la gamine avait noué un lien privilégié.

Avec une Lune en Taureau, surdéterminée par sa superposition avec l’Ascendant, l’enfant est tout particulièrement sensible à la stabilité de l’environnement. Dans notre cas, cette stabilité est brisée de manière précoce, à l’âge de trois ans ; elle est rompue à nouveau, à l’âge de douze ans. Cette problématique de l’attachement, cette précarité de la sécurité lunaire de base s’est inscrite pour faire structure psychique et pour conditionner une part significative de l’existence. Avec Uranus qui passe sur la Lune pour se mettre en carré avec la Lune Noire, l’heure est à la mise en lumière. À travers la visite de la divinité planétaire, une opportunité est offerte, celle de mettre à jour les enjeux, les conditionnements, les enfermements qui pèsent sur la Lune en Taureau. Le rêve survenu à cette époque présente l’avantage de situer clairement le débat.

– D’un côté, la recherche d’une protection représentée par le vaccin et par la soignante-couturière qui renvoie à la Mère.

– De l’autre côté, l’idée que ce vaccin pourrait être dangereux. Dangereux, nous l’avons dit, parce que la sécurité continue de dépendre de l’objet et qu’elle pourrait être mise à mal comme elle l’a été au cours de son enfance.

– Son mariage est d’abord structuré sur des enjeux de type lunaire. Il lui offre une stabilité et un sentiment de sécurité affective. Ils sont mariés depuis très longtemps ; elle est convaincue que son mari ne la quittera jamais. De ce point de vue, le mari représente le parent qui lui a manqué et le mariage fait office de vaccin contre la peur de la rupture et de la perte.

– À travers sa vie sexuelle passée qu’elle qualifie de débridée et dans la relation qu’elle a aujourd’hui avec son amant, elle s’émancipe de sa position de jeune fille pour se situer du côté de Vénus.

Dans la relation entre la Lune et Vénus et dans le cas d’une femme, le clivage se fait souvent entre le féminin maternel et le féminin érotique, entre la mère et l’amoureuse. Dans le cas de ma cliente, il se fait entre la fillette qui reste attachée au parent, d’un côté, et l’amante, de l’autre côté. À partir de là, cette femme restait dans l’entre-deux, dans l’indécidable. Sur fond de traumatisme précoce, elle faisait des allées et venues entre l’enfance et l’âge adulte.

Nous sommes partis du rêve et nous avons abordé ensuite le transit d’Uranus avec l’idée très simple de mettre en lumière ce qui se joue au niveau du carré entre la Lune, d’un côté, la Lune Noire et Vénus, de l’autre côté. Je ne sais pas où elle en est aujourd’hui, mais à l’époque elle semblait avoir trouvé un certain équilibre affectif, même si elle n’était pas épargnée par la culpabilité. À sa manière et au prix de certains aménagements, elle avait réussi à faire tenir ensemble la sphère de la Lune et la sphère de Vénus qui jouent un rôle si important dans son thème.

Compte tenu du transit d’Uranus, l’astrologue pourrait penser que c’est l’occasion de reconsidérer l’équilibre précaire que cette femme a trouvé et de faire évoluer les choses. Pour ma part, je me garderais bien de faire des suggestions qui iraient dans ce sens, parce que cet aménagement est avant tout une manière de survivre à des traumatismes infantiles. À partir de l’analyse du rêve, nous avons exploité le transit d’Uranus pour mettre en lumière ce qui se passait entre la Lune et Vénus. Cela a permis à cette femme de donner un peu plus de sens à ce qu’elle vivait et de mieux comprendre les mobiles inconscients qui organisaient sa vie affective. Et la compréhension de soi est toujours le préalable à l’acceptation de soi, à la capacité de faire la paix avec soi. Cela vaut de la même manière sur le plan relationnel : on ne saurait dissocier notre capacité d’aimer l’autre de notre capacité à le comprendre.

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